Au-delà de la
question de l’évolution rapide des métiers, la formation actuelle des
professionnels du soin souffre de nombreux écueils :
Il y a trop peu
de coopération interdisciplinaire
Les étudiants
ne sont pas suffisamment formés à l’exercice avec le numérique
Les profils
sont peu diversifiés, la formation mettant trop souvent de côté le versant
humaniste, psychologique et sociologique des professions de santé au profit de
profils hyper-scientifiques
Face à ces
difficultés que rencontrent les formations de santé, le Président a fait
l’annonce de mesures encourageantes. Prônant un enseignement supérieur ouvert
où chaque jeune peut trouver sa place, la FAGE et ses fédérations serons
attentives aux réformes des études de santé à venir afin qu’elles puissent
permettre la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, mais aussi
répondre convenablement aux besoins de santé de la population, les deux étant
intimement liées.
Suppression du NC
De
fait, nous sommes favorables à
la suppression du Numerus Clausus réclamé depuis plusieurs années. Ce système peine
à être efficace dans ses missions :
-Il est de plus en plus contourné
par les étudiants français qui vont étudier à l’étranger pour revenir finir
leurs études en France : l’enseignement supérieur français pourtant financé par
le contribuable ne peut-il donc pas les accueillir ?
-Il ne tient pas compte des mobilités
européennes liées à la reconnaissance mutuelle des diplômes, très
importante dans certaines professions (plus d’1/3 des nouveaux inscrits à
l’ordre – nouveaux praticiens autorisés à exercer en France- ont un diplôme
obtenu hors de France chez les dentistes)
-Il nécessite d’anticiper une
dizaine d’années au préalable les besoins avec beaucoup d’inconnues et de
dynamiques changeantes (changements de mœurs pour les départs à la retraite,
modalités d’exercice des jeunes praticiens etc.)
Par ailleurs,
la sélection par numerus clausus s’accompagne d’une année de concours
extrêmement éprouvante conduisant souvent les étudiants à s’investir corps
et âme deux années de leur vie pour échouer au final. Nombre d'entre eux
sont pourtant de bons étudiants qui finiront par obtenir un niveau master,
suite à des réorientations dans des conditions difficiles après un échec
au concours.
Cela entraîne
par ailleurs un effet « mise initiale » important : après 2 années éprouvantes, souvent accompagnées
malheureusement d’un investissement financier dans une structure de préparation
privée, il est très difficile pour un étudiant admis de remettre en question
son projet professionnel. Pourtant, quand les cours commencent et en
particulier les stages hospitaliers, nombre d’entre eux peinent à s’épanouir.
Mais la pression sociale et psychologique (engagement fort avec la mise
initiale) inhibent fortement les projets de réorientation. Si certains
abandonnent malgré tout, d’autres terminent leurs études et n’exercent pas le
soin (fonctions administratives, journalisme etc.) : ils sont ¼ des néo-diplômés
en médecine dans cette situation.
La fin du concours devrait permettre de
mettre fin à la compétition entre étudiants et permettre de proposer des
parcours d’accompagnement et des aménagements d’études notamment pour les
étudiants salariés qui n’ont aucune chance dans le système actuel. Cette mesure
redonnant leurs chances aux étudiants les moins favorisés, la PACES n’étant pas
un système égalitaire : les plus aisés étaient favorisés (prépas privées heureusement
compensées par le tutorat, appartement à proximité de l’université et cadre de
vie facilitant les révisions) et les plus fragiles fortement pénalisés (le
temps travaillé étant du temps de bachotage perdu par rapport à aux étudiants
concurrents, un étudiant salarié a des chances minimes de réussir le concours.
Il en va de même pour tout étudiant ayant à charge certains de ses frères ou
sœurs ou toute autre situation).
Au-delà
de l’homogénéisation des profils, les épreuves du concours posent également
problème. Très scientifiques, elles ne donnent pas leur chance à ceux qui
feront les meilleurs professionnels de santé, mais seulement au plus
scientifique, voir simplement à ceux qui sont capables de mémoriser
d’importantes quantités d’informations.
LMD et sortie du modèle de PACES
Les expérimentations d’alternatives à la PACES ont montré la voie : les
alterPaces ont montré qu’un profil différent d’étudiants venus de licence
pouvait réussir les cycles supérieurs des études de santé, et PluriPass que
l’orientation progressive était une des clés de la dédramatisation de l’échec
au concours.
Il convient désormais d’aller au bout de la logique et d’intégrer ces
éléments en faisant rentrer les études de santé au sens large (y compris les
cursus paramédicaux pour lesquels il convient de finaliser le processus
d’intégration universitaire) dans le droit commun des autres formations
universitaires. La mise en place
d’un système de licence, plus progressif, laisse plus de temps à l’étudiant
pour découvrir l’ensemble des débouchées de la santé ne se limitant par
ailleurs pas aux professions ordinales. On rappellera qu’en termes de
débouchées, le CHU est souvent le premier employeur de la région : on devrait
pouvoir construire un certain nombre d’insertions professionnelles !
Cette réforme
est également l’occasion de revoir le programme et valoriser l’apprentissage du management et des
sciences humaines indispensables à la relation soignant-soigné. Ces
éléments, communs à l’ensemble des professions du soin, pourraient par ailleurs
faire l’objet d’un tronc commun entre ces métiers.
Il convient
également de favoriser les ponts entre filières de santé, et également
en dehors du monde de la santé. Pour les premiers, c’est l’occasion de
favoriser la connaissance mutuelle des professions entre elles, et de favoriser
les réorientations. Pour les seconds, il s’agit d’investir dès à présent dans
les nombreux besoins des innovations en cours et à venir dans le domaine de
l’intelligence artificielle ou encore des biotechnologies. Les
cursus de santé gagneraient une énorme richesse à s’adosser davantage sur
d’autres cursus universitaires d’informatique, cursus ingénieurs
en diversifiant tout autant le profil des professionnels de santé qu’en
favorisant des sorties par le haut pour des étudiants s’éloignant des
professions du soin en leur permettant une continuité d’études.
Il est
essentiel que des Mentions et des Parcours soient organisés en son sein : il ne
s'agit pas de refaire les erreurs de la PACES et d’en étaler son fonctionnement
sur 3 années avec un tronc commun prépondérant au détriment de la formation de
certaines professions.
Accès à la recherche
Les
cursus en santé possèdent également un accès à la formation à la recherche
disparate : quand cette formation se surajoute selon des modalités locales dans
la plupart des filières de la PACES, elle est souvent inexistante ou très peu
développée dans les filières non-universitaires. Pourtant, son développement et
notamment en ambulatoire est un enjeu important, notamment pour l’évaluation
des médicaments en vie réelle ou pour l’amélioration des pratiques
professionnelles. La réingénierie des cursus devant prendre en compte ces
opportunités.
Cette réforme de la formation en santé,
attendue depuis des années, est la dernière brique pour faire entrer pleinement
ces études dans le processus de Bologne. Cette étape sera décisive afin de favoriser les mobilités
européennes des jeunes et d’ouvrir nos cursus à l’international.
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