Alors que la précarité étudiante s’aggrave dans un contexte socio-économique difficile et que les inégalités se creusent, faisant le lit des discours de haine et d’intolérance, il est impératif de démocratiser l’accès et la réussite dans l’enseignement supérieur et la recherche. L’ensemble de la communauté universitaire est de plus en plus sensibilisé à l’impact de la qualité de vie d’un.e étudiant.e sur sa capacité à entrer dans les études supérieures, à s’y épanouir et à y réussir. Cependant, alors que les CROUS sont les principaux opérateurs de la vie étudiante et de la protection sociale des étudiants, ils sont aujourd’hui mis en danger par une insuffisance des dotations prévues au sein du Projet de Loi de Finances.
Les CROUS, héritiers des premières Associations Générales Étudiantes, sont chargés de créer, gérer et piloter les services à l’étudiant permettant à celui-ci de vivre dans des conditions décentes et ainsi d’étudier dans un contexte propice à la réussite et l’épanouissement personnel. Opérateurs publics, ils sont financés par l’Etat. Chaque fin d’année voit fleurir les débats autour du Projet de Loi de Finances (PLF) pour l’année suivante. Le PLF décrit les crédits alloués aux CROUS dans le Programme 231 relatif à la vie étudiante. Cette année, ce programme fait l’objet d’une diminution de certains de ces crédits. La principale diminution concerne les fonds propres de chaque CROUS et s’élève à 50 millions d’euros faisant passer les crédits de paiement de 95 M € alloués en 2015 à 45 M €. Aux yeux du Gouvernement « le maintien de la dotation en autorisations d’engagement vise à maintenir la capacité du réseau à engager des opérations d’investissement, tandis que la diminution des crédits de paiement de 50 millions d’euros vise à ce que les CROUS mobilisent leur trésorerie afin de faire face à leurs besoins en décaissements dans le cadre des opérations d’investissement prévues. ».
Concrètement, cette proposition risque de mettre en danger certains CROUS qui ne sont pas en capacité de mobiliser leur trésorerie pour s’acquitter de leurs frais d’investissement. Il n’est pas exclu que certains CROUS se retrouvent dans des situations très complexes d’incapacité à payer les frais dus ou fassent marche arrière par anticipation sur le lancement effectif de certains projets. Il faut noter que cela est d’autant plus vrai lorsque l’on connaît la réalité des modalités de financement des investissements, principalement immobiliers : lorsqu’une construction est cofinancée par un CROUS et une Région, celle-ci ne verse sa participation qu’une fois la construction arrivée à terme, obligeant le CROUS à avancer l’ensemble des frais. Dans cette situation, si le CROUS n’a pas une trésorerie suffisante, le projet ne sera peut-être jamais lancé ou sera stoppé en pleine réalisation. Ce probable immobilisme subi des CROUS en termes d’investissement, principalement dans le logement, dans un contexte d’augmentation du nombre total d’étudiant.e.s et du nombre d’étudiants boursier.e.s, risque de mettre à mal l’amélioration des conditions de vie des étudiant.e.s que nous appelons de nos vœux.
Premier volet de la vie étudiante, ces conditions de vie sont déterminantes pour l’épanouissement de l’étudiant.e et sa réussite, les études le montrent. A titre d’exemple, nous pouvons citer l’INSEE qui, dans une étude de 20091 rapporte qu’un.e étudiant.e salarié.e plus de 13h par semaine sur deux échoue, une proportion bien supérieure à celle des étudiant.e.s non-salarié.e.s ou salarié.e.s moins de 13h hebdomadaires. La distance entre le lieu de vie et le lieu d’études, avec pour corollaire le temps passé dans les transports, influe, elle aussi, sur la réussite.
D’autre part, la richesse de la vie de campus, l’autre volet de la vie étudiante, joue un rôle majeur dans l’appropriation par l’étudiant.e de sa filière et son campus, préviennent les situations d’isolement et permettent l’engagement sous toutes ses formes. Trop longtemps sous-estimée, la qualité de la vie de campus, tout aussi importante que celle de la vie universitaire fait enfin l’objet d’attentions diverses. Avec l’obligation pour les regroupements d’établissement de développer des Schémas Directeurs de la Vie Etudiante, un premier pas a été réalisé envers la promotion d’une vie de campus riche et intégrative. Toutefois, bien que les réformes structurelles et la mise en concertation des acteurs de la communauté universitaire soient positives, celles-ci ne doivent pas cacher le désengagement financier de l’Etat envers les CROUS, premiers opérateurs de la vie de campus. Malheureusement, nous pouvons lire dans le PLF 2016 une baisse de 1 million d’euros des crédits alloués en fonctionnement à la restauration et au logement, autrement dit aux services dont la qualité a un impact direct sur celle de la vie de campus.
Alors que le Gouvernement parle de Priorité Jeunesse, de Plan 40 000, que François Hollande se déplace à l’anniversaire des 60 ans des CROUS, dévoile le contenu du Plan National de la Vie Etudiante et dit vouloir permettre à 50% d’une classe d’âge d’être diplômée de l’enseignement supérieur, la FAGE reste perplexe face aux propositions faites dans ce Projet de Loi de Finances. Afin de sortir de cette incohérence entre son discours et ses actes qui mettent en danger la politique d’investissement des CROUS, donc la capacité d’augmenter le nombre de places en résidences universitaires et en restaurants universitaires afin de répondre à l’impérieux besoin de démocratiser l’enseignement supérieur, le Gouvernement doit assumer sa responsabilité et donner des moyens suffisants à l’un des promoteurs de la mobilité sociale.
La FAGE, engagée depuis la rentrée pour revendiquer une augmentation du budget alloué à l’enseignement supérieur, à la recherche et à la vie étudiante, appelle les étudiant.e.s à rester mobilisé.e.s jusqu’à ce qu’une réponse crédible soit apportée par le Gouvernement.
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